BASKET-BALL - Intégré cette année en équipe première, le cadet saint-paulois, qui fête aujourd’hui ses 18 ans, s’y fait sa place. Sans tapage. Et sans fausse note.
Il affiche un visage poupon, et des yeux bleu océan qui se font fuyants lorsqu’il croise un regard étranger. Julien file vers l’âge adulte et ses 18 ans, qu’il fête aujourd’hui. Cette frimousse est un point de repère nécessaire pour bien s’assurer de l’âge de Julien Poivet. Car des gradins, on jurerait qu’il a 10 ans de plus.
Lancé dans le grand bain lors de la première journée de cette saison, à Sainte-Marie, le jeune homme n’en finit pas d’impressionner. Jusqu’à s’imposer. En douceur. Le ton qu’il emploie pour s’exprimer, de sa voix discrète, mais assurée. Onze matches déjà à une vingtaine de minutes de temps de jeu en moyenne comme meneur ou arrière. Onze démonstrations de son talent et la découverte d’un joueur au QI basket qui ne souffre pas de son jeune âge. Là où beaucoup auraient pu s’envoler vers une sphère nuageuse, lui est resté les pieds sur terre après ses débuts en équipe première. Sur le parquet comme à la ville, adaptant son jeu aux exigences du haut niveau local et à ses propres limites, qu’il a intégrées à la vitesse du son.
"en cadets,j’avais à peine ma place"
"Physiquement, je n’étais pas trop rassuré, explique t-il. Je suis relativement grand (1,86 m) mais pas épais (68 kilos). Je savais que j’étais un ton en dessous. En cadets, j’aimais bien aller au cercle mais à l’entraînement j’ai bien vu que je devrais changer et m’adapter. J’ai essayé de travailler sur d’autres points : je shoote plus maintenant, même si ce n’est pas mon point fort, et j’essaie de créer, de faire des passes. C’est comme ça que je pense apporter". Un discours confondant de maturité, qui fait vite oublier qu’il n’est que cadet 3e année. Impression confirmée lorsqu’on le questionne sur son modèle. Il avance dans un premier temps timidement Kobe Bryant ou Lebron James. Réponse de son âge. Qui prend un coup de vieux après réflexion. "En fait ce que j’aime, c’est le jeu des Spurs, la manière qu’ils ont de jouer en équipe".
Un amateur du jeu, plus que du je qui pourtant ne se prédestinait pas à cette réussite éclaire. Lorsqu’il pose les pieds à la Réunion dans le sillage de ses parents, à 11 ans, en provenance de Blois (Loir-et-Cher), il est un tennisman. La balle orange, il ne la taquine que devant la maison, sous le regard bienveillant de son père Jean-Noël, joueur de N4 puis d’Excellence régionale pendant 17 ans à l’USM Olivet, en coin. C’est finalement son voisin, Stéphane Angibaud...président du BC Saint-Paul, qui le conduira vers son premier entraînement en groupe. Et attirera dans son sillage son père, qui s’occupe aujourd’hui des poussins au BCSP, et son frère, Paul, qui évolue en minimes.
Une catégorie où Julien était loin de survoler les débats. Avant de croiser la route de Stan Irigaray qui déjà avait senti en lui quelque chose de différent, en cadets, qu’il dirigeait, alors "j’avais à peine ma place, confie le tout frais majeur. Je n’étais pas très bon et il m’a fait confiance et m’a conseillé". Investissement payant, aujourd’hui, à l’étage supérieur. "On sentait déjà qu’il avait envie, se souvient Stan Irigaray qui a pris les rênes de l’équipe première cette saison. Il travaillait beaucoup et était à l’écoute. Cette année il a passé un cap rapidement et il a un très grand rôle en apportant notamment sa fraîcheur".
Donnant, avec Kevin Gastrin, un cadet également intégré cette saison, un coup de jeune à un effectif de trentenaires (Labbe, Salaün, Lezin, Dhaussy, Manicon, Bon) qui pourrait voir avec l’arrivée de Julien mais aussi l’éclosion de Lionel Fernante ou Erickson Tatel, l’élément d’une nouvelle ambition, qui se heurte depuis trois ans aux portes des demi-finales. "Ils (les trentenaires) savent que ça ne va pas durer indéfiniment pour eux", glisse pragmatiquement Julien.
"je suis encore perfectible’
C’est donc tout naturellement que ce groupe sain a pris sous son aile ces jeunes pousses et le plus prometteur d’entre-eux qui admet sans mal qu’il est "encore très perfectible". "Ils nous ont bien intégrés, souligne Julien. Ils nous prennent à part pour nous donner des conseils et nous, on est à l’écoute". Et à la vue, comme avec Guillaume Salaün, dont la technique si particulière de gaucher confère au mimétisme avec celle de son cadet. "J’essaie de prendre les mêmes attitudes que lui sur le terrain, confirme l’élève. Je sais que ce qu’il fait est bien et il me conseille souvent, comme Stan ou Johnny (Labbe) pour la défense".
Un cercle vertueux ouvert par les anciens pour Julien et ces jeunes saint-paulois aux idées plus longues que les dents. "Il est plein de qualités, souligne Léo Chalopin, qui a chaperonné la pépite. Il est sérieux mais sait aussi se détendre". Une maxime qui s’applique pour Julien loin des parquets. Au lycée, où il prépare son bac S avant sûrement d’intégrer une prépa aux écoles de commerce. Un terrain scolaire où le basket lui permet de s’évader, même s’il doit le sacrifier ponctuellement en faveur de son carnet de notes, priorité évidente. "L’année prochaine, avec les études, je ne suis pas sûr de pouvoir beaucoup jouer. Mais je n’imagine pas une semaine sans basket, souffle Julien qui dans ce domaine s’astreint aussi à des cours du soir. Ça me permet de me défouler, de jouer avec mes copains et vu que je me débrouille pas mal, de prendre du plaisir". Ce qu’il fera encore ce soir face aux Aiglons. Comme un grand qu’il est désormais
Hervé Brelay