06 octobre 2007

SENEGAL : Mathieu FAYE (Porte-parole du collectif des anciens basketteurs) : ‘Notre démarche est patriotique et rien d’autre -’

L’ancien international sénégalais de basket et porte-parole du collectif des anciens internationaux qui sont montés, hier, au créneau pour exiger le départ de l’équipe fédérale et de la direction technique nationale se veut clair : ‘Nous ne sommes pas là pour nous servir du basket, mais plutôt pour servir cette discipline qui nous a valu autant de merveilles’. Mathieu Faye ajoute que cette démarche qu’ils ont entreprise, dès à présent, consiste à redonner au basket sénégalais des couleurs. Par conséquent, dans l’entretien qu’il nous a accordé hier, en marge du point de presse, le porte-parole du collectif des anciens internationaux de basket précise que leur démarche est juste patriotique. Et rien d’autre. Entretien…

Wal Fadjri : Pourquoi exigez-vous le départ des membres de la Fédération sénégalaise de basket et de la direction technique nationale ?

Mathieu Faye : Parce qu’ils ont montré leurs limites. Ils sont incapables de mettre le basket sénégalais sur une bonne direction. Au contraire, depuis leur arrivée à la tête des instances supérieures, le basket sénégalais est en train de mourir de sa belle mort. On n’a pas besoin d’ouvrir les yeux pour le remarquer. Il n’y a aucune volonté politique des responsables de la Fédération sénégalaise de basket, ni des autorités compétentes de l’Etat qui concourent à la promotion du basket sénégalais. La Fédération mise sur pied depuis 2005 pour mener à bien le basket sénégalais a montré toutes ses carences. Cette fédération a manqué de savoir-faire sur toute la ligne. Après la débâcle des équipes nationales en coupe du monde (masculine et féminine), respectivement au Japon et au Brésil, le Sénégal vient de subir une autre humiliation sur ses propres terres avec l’échec des ‘Lionnes’ en finale du championnat d’Afrique des nations. Ce n’est pas la défaite proprement dite qui fait mal dans cette affaire. C’est plutôt la façon dont l’équipe a été gérée qui dérange. La Fédération sénégalaise de basket a fait montre, tout au long de ce championnat d’Afrique, de son amateurisme. Au moment des évaluations et tirant profit de ce que nombre de ceux-là qui ont donné au basket sénégalais ses plus belles lettres de noblesse sont encore présents sur le territoire national, le collectif des anciens basketteurs a refusé de se dérober devant ses obligations majeures. Les raisons pour le faire sont multiples et variées. Elles tiennent, pour l’essentiel, à la dette que nous devons à notre pays et au basket. Mais aussi, à l’expertise incontestée dont nous nous prévalons nous tous et chacun dans son domaine spécifique. Il ne s’agira pas pour les citoyens et les militants du basket que nous sommes d’exacerber les frustrations et l’amertume des Sénégalais. Des frustrations et l’amertume nées des derniers Championnats d’Afrique homme que l’Angola a abrités, en août dernier et celui des dames que le Sénégal a organisé du 20 au 30 septembre dernier. Il s’agit pour le collectif d’apporter notre pierre à l’édifice. L’amateurisme, la cupidité et le manque de noblesse et de générosité dont la Fédération sénégalaise de basket a fait montre tout au long de ce 20e championnat d’Afrique de basket est largement suffisant pour qu’elle rende le tablier ou qu’elle soit démise.

Wal Fadjri : Mais pourquoi avoir attendu jusqu’à ce que l’irréparable se produise pour décrier la gestion de la Fédération ?

Mathieu Faye : C’est là une question à relativiser. Nous sommes, quelque part, fautifs d’avoir observé la situation pourrir. Mais, que ce soit moi ou quelqu’un d’autre membre de ce collectif, nous avons de tout le temps mis notre expertise à la disposition de notre pays. Personnellement, j’ai erré pendant des mois autour de la fédération et du ministère des Sports pour mettre mon savoir-faire à la disposition des autorités compétentes du basket, mais le traitement qui m’a été réservé, frise le ridicule. Je rappelle qu’on m’a même attribué, à l’époque, un poste de chargé de mission au niveau du ministère des Sports sans aucun contenu. Et j’ai signifié à qui de droit que chez moi, on ne travaille pas comme ça. Fatou Kiné Ndiaye a connu le même sort que moi. Ne pouvant plus supporter cette indifférence qui m’a été faite, j’ai dû partir sous d’autres cieux pour vivre ma passion du basket. Il ne nous reste plus, hélas, que nos yeux pour pleurer. Mais nos larmes ne doivent pas avoir été versées en vain. Elles doivent plutôt servir à remettre le bateau du basket sur les flots. Et que cette mauvaise passe demeure à jamais un mauvais souvenir.

Wal Fadjri : Et cela consiste, dans votre logique, à faire partir les membres de la Fédération sénégalaise de basket ?

Mathieu Faye : Mais bien sûr. Cette équipe fédérale dont l’objectif, dès le départ, reposait sur l’obligation de résultats, doit tirer sa révérence. Elle doit déposer, sans délai, son rapport entre les mains des autorités administratives de ce pays et se mettre à la disposition des auditeurs et des évaluateurs. Il faudra qu’elle rende compte de sa mauvaise gestion. Une gestion truffée d’amateurisme.

Wal Fadjri : Et que préconisez-vous comme alternative pour pallier ces manquements que vous avez soulevés ?

Mathieu Faye : La mise en place d’une structure concertée entre personnes concernées et soucieuses du développement du Sénégal, de son sport et de sa bonne réputation. Les missions qui seront assignées à cette structure qui assurera une phase de transition, définie et précisée par les autorités compétentes du pays, porteront sur l’élaboration d’un plan de relance globale du basket avec des objectifs à court, moyen et long terme dans les trois mois suivant son installation. Le coût et les sources de financement seront précisés avant l’installation de cette structure qui assurera la gestion du basket national après le débarquement de l’équipe fédérale. L’exécution d’une politique d’infrastructures à l’échelle nationale, la reprise en main des petites catégories et la promotion du mini-basket, la détection des jeunes talents et leur formation, la promotion des modules sports-études seront rigoureusement prises en compte par cette structure qui sera mise en place. De même que le parachèvement de la carte nationale du basket par la constitution de ligues encore inexistantes aujourd’hui dans beaucoup de régions du Sénégal, sera entrepris. Un championnat navétane et playground de basket sera organisé afin de promouvoir le rayonnement de la discipline dans tous les coins et recoins du pays. Toute cette politique sportive sera accompagnée par des mesures incitatives, une professionnalisation progressive, l’exonération du matériel et des équipements sportifs de tous droits de douane et de toute autre taxe tant sur le neuf que sur l’usagé. L’incitation au mécénat et au sponsoring par le mécanisme de la déduction fiscale sera de mise. De même que les membres de cette structure vont entreprendre des négociations avec les compagnies aériennes, les hôtels et autres réceptifs afin d’avoir une réduction d’au moins 50 % sur le coût des prestations tant au Sénégal qu’à l’étranger. La formalisation de toute cette politique sportive en vue par le canal du ministère chargé des Collectivités locales en rapport avec celui chargé des Sports, sera une obligation pour chaque arrondissement, commune, département et région. Ces différents démembrements du pays constitueront un club de basket présent dans toutes les catégories. Il s’agira, enfin, de nouer avec l’autorité administrative un dialogue constant, fructueux et véridique portant sur les objectifs visés et les moyens à mettre sur pied.

Wal Fadjri : Etes-vous prêts à entreprendre, au niveau de votre collectif, cette politique sportive ?

Mathieu Faye : Nous sommes tous disposés à servir notre pays. C’est une démarche patriotique qui nous motive et rien d’autre. Le collectif n’est pas là pour bavarder sur des questions de personne ou personnel. Nous nous engageons à mettre notre expertise à la disposition de notre pays. Un point c’est tout. Ceci étant clair, nous comptons, maintenant, impliquer tous les Sénégalais vivant au Sénégal ou à l’étranger qui ont toujours fait montre de leur disponibilité, de leur ouverture et de leur générosité. Les membres de cette structure de redressement qui seront considérés comme des chargés de mission spéciaux, ne percevront aucune rémunération. Mais, ils auront toutefois une prise en charge pour les frais à exposer. De même que la presse sportive sera associée au cœur de cette nouvelle démarche qui aiderait à sortir le basket sénégalais de l’ornière.

Propos recueillis par M. Nicolas SONKO