REUNION : "Le basket, c’est pas que jouer au ballon"
BCD - SAINT-PAUL - Souleymane Diallo et Stan Irigaray s’affronteront ce soir en demi-finale retour du championnat. Tout au long de la saison, ils sont confrères, comme techniciens, savourant leur passion dans son intégralité.
Pour filer la métaphore, on pourrait imager que ces deux grands gaillards ont deux casquettes. Sauf que dans chacune de leur fonction, ils n’en portent pas sur leur crâne privé d’oasis capillaire. Entraîneur et joueur à la fois, on dira donc sans fioritures que Souleymane Diallo, 26 ans, et Stan Irigaray, 33 ans, ont deux fonctions. Et une même passion. Le basket. Qu’ils exercent à longueur de saison sur les parquets, sur le devant de la scène en fin de semaine. Et qu’ils transmettent, à l’ombre des tribunes, le soleil au zénith, au quotidien. Chacun à leur manière, avec cette identique volonté. Faire vivre son sport. Et s’offrir la possibilité de vivre de son sport.
C’est ce que fait Soully avec les cadets du BCD ce mercredi, il y a dix jours, sur les terrains extérieurs de Champ-Fleuri. Comme tous les mercredis. Sauf que cette fois, la classe est dissipée. L’entraîneur est chafouin alors que ses consignes rentrent par une oreille de ses joueurs pour transpercer l’autre dans la foulée. "Le basket c’est pas que jouer au ballon", s’égosille-t-il après un mauvais placement. Deux allers-retours harassants ligne de fond, mi-terrain pour ceux qu’il a pris en mains cette année, alors qu’il s’occupe depuis deux saisons de la réserve senior, sa première expérience en tant que coach. Dix pompes pour le dernier. "Mauvaise passe". Et une rasade de "suicides" supplémentaire. "Mauvaise position" dans un petit jeu à trois. Interruption. Puis grosse soufflante. "Si vous n’en avez rien à foutre, je ne vais pas me faire chier à venir". Les têtes se baissent. Le message passe, sans que personne ne moufte. Si ce n’est celui qui encadre les jeunes avec lui, Fred Mussard, pour en rajouter une couche. La frustration de l’ancien pro venu tard au basket à 15 ans avant de fouler les parquets de Pro B avec Besançon trois ans plus tard s’évacue. Mais pèse de tout son poids. "Bien sûr que je joue de mon statut, explique sans détour le bondissant dionysien. L’exigence que j’ai est légitime. Le but est qu’ils soient aussi forts que moi et après encore plus forts j’espère".Même lieu, même décor, mais posture différente une semaine plus tard, lorsque l’on rend visite à Stan Irigaray sur le terrain extérieur de Saint-Paul centre. Ses élèves lui arrivent à peine à la hanche et la démarche est plus détendue. Plus coutumière avec ces débutants puis lors de l’arrivée des cadets, dont il s’occupe également, une heure avant le rendez-vous fixé pour tâter un peu du ballon. Le salut est amical, le ton posé et avenant. Il faut dire que Stan est dans son bureau. Voilà deux ans que le Saint-Paulois accroche le sifflet autour du coup et distribue les chasubles sur son lieu de travail. Pour son employeur. Le BC Saint-Paul, là où il a débuté le basket en cadet 1ere année. Pour son plaisir. Celui d’avoir concilié vie professionnelle et sportive. "Je voulais être pro, expose t-il. J’ai fait des essais à Cholet et à Pau mais j’avais commencé trop tard. Après, quand je suis rentré à la Réunion, en 2003, je voulais passer mes diplômes, puis j’ai travaillé dans le social. J’aime tout dans le basket, et comme en plus je voulais travailler dans le basket". La boucle est bouclée. Et le bonhomme semble comblé
Avec cette conscience, comme l’a Souleymane Diallo, d’avoir valeur d’exemple en agissant sur l’ensemble de la chaîne. "J’ai un double rôle, explique Soully. J’ai valeur d’exemple sur le terrain et professeur à l’entraînement". Il est triple pour Stan, qui gère depuis cette saison les seniors, qui sont aussi en majeure partie ses amis. "J’essaie de penser à l’équipe en premier, même si parfois c’est compliqué", décrit le Saint-Paulois.
Avec leurs méthodes et leur vécu, ces deux mordus de basket, qui ne lâchaient pas le ballon après en avoir découvert toutes ses facettes, partagent le même but. Former. "Ma plus grande fierté en partant de la Réunion ne serait pas qu’on dise que j’étais un super joueur, mais que j’ai laissé un bagage technique à mes joueurs", lâche sans faux-semblant le capitaine du BCD.
Pour Stan, la voie est toute tracée. "À Saint-Paul, où je me projette dans 10 ans. J’aimerais qu’à terme les jeunes aient cette culture basket, les pousser vers la qualité mais aussi pour le plaisir d’être ensemble et transmettre ces valeurs éducatives". Pour au moins encore un an à la Réunion pour Soully, où il veut passer ses diplômes et préparer sa reconversion. Avant peut-être de trouver une aventure sportive où il pourra en même temps exercer comme entraîneur, avant de s’y consacrer totalement. Ce sera dans le basket pour tous les deux et pour longtemps. Que ce soit pour se croiser ce soir c’est comme joueur en demi-finale du championnat. Ou comme entraîneur, en demi-finale du championnat cadet
Hervé Brelay
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